Autonomie alimentaire

Le temps des semis et des boutures

Nous avions rencontré Nathalie Ranjon à la première journée de stage qu’elle organisait dans son Jardin des Harmonies pour faire découvrir les plantes comestibles et médicinales. Nous sommes retournés la voir afin d’être initiés aux semis et aux boutures printaniers. Si ces notions vous sont peu familières, découvrez-les avec nous.


Toute plante est issue d’une graine. Mais dans cet article qui ne saurait être exhaustif,
nous nous consacrerons plutôt à celles dédiées au potager. 

Tout part d’une graine

En godet, en jardinière ou en pleine terre, le printemps est une période propice pour semer des graines et en récolter les fruits quelques semaines ou mois plus tard.

S’il est possible d’acheter des plants à repiquer directement dans la terre préalablement préparée, on peut aussi s’amuser à semer nous-mêmes des graines dès le printemps pour les voir évoluer, se transformer et grandir. Selon la période de l’année, certaines graines pourront être semées directement en place. Mais concentrons-nous sur les semis à faire en pots, et à abriter en attendant des jours plus chauds.

Chaque région possède un climat spécifique, mais vous pourrez trouver sur Internet des calendriers de semis qui vous donneront une idée du moment où les faire. Nathalie évoquera avec nous les légumes du soleil tels que les tomates, aubergines, poivrons ; les légumes racines, comme les betteraves, carottes et radis ; les légumes à feuilles comme les salades ; la famille des cucurbitacées (courges, courgettes, melons, concombres, etc.).

 

 

Semer dans de bonnes conditions

Pour réussir ses semis, certaines conditions doivent être réunies : du terreau fin, une température suffisante et stable et un arrosage équilibré. Pour que vos graines évitent le froid et puissent germer, si vous commencez vos semis en février-mars, mieux vaudra donc avoir une serre, une véranda ou, faute de mieux, de la place à côté de votre cheminée ou poêle. Si vous n’avez pas d’autre option, vous pourrez les disposer près d’un radiateur, mais ce type de chauffage assèche la terre rapidement. Vous utiliserez alors un petit pulvérisateur, pour maintenir votre terreau humide.

Certains fabriquent eux-mêmes des châssis pour semis avec des bottes de foin et des plaques en verre ou autre matériel de récupération, mais gare aux limaces et aux rongeurs qui peuvent parfois se glisser dessous.

Nathalie nous explique que l’on peut se procurer du terreau spécial semis dans les magasins de jardinage, mais qu’on peut également le réaliser soi-même en s’y prenant bien à l’avance, avec par exemple un mélange de compost et de terre du jardin passée au tamis, ou en préparant du terreau de feuilles. Une de ses astuces : utiliser les bacs en polystyrène utilisés pour les poissons comme support dans lequel elle mettra le terreau. Notons que quel que soit le support, il doit permettre la circulation d’eau par le bas.

 

Quelques conseils avant la germination

Au moment de semer la graine, prêtez attention à sa taille et enfoncez-la dans la terre d’une profondeur de trois fois sa taille. Si une graine mesure 2 millimètres, elle ne devra donc pas être à plus de 6 mm de la surface de la terre. Une fois les semis réalisés, arrosez-les. Pensez bien à étiqueter ce que vous avez semé pour ne pas vous mélanger les pinceaux, avec l’espèce et la date de semis.

Pendant quelques jours, veillez à ce que vos semis ne soient ni trop secs ni trop arrosés, et qu’ils ne moisissent pas. Une sorte de mousse verte sur le dessus de la terre pourra vous alerter et vous inciter à réduire votre apport en eau. Surveillez aussi la température, afin qu’elle ne soit ni trop haute (généralement entre 18° et 24°) ni trop basse et ne fluctue pas beaucoup. « Si au bout de 10-15 jours, la graine n’a pas commencé à germer, sauf exception, partez du principe que c’est cuit et qu’elle ne donnera rien », précise Nathalie. Mieux vaut donc semer plusieurs graines pour s’assurer que certaines germeront.

Pour les légumes racines comme les carottes ou les radis, on pourra semer à la volée directement sur une terre bien préparée, désherbée, meuble, aérée et saupoudrée de terreau afin d’éviter l’effet croûte à la surface du terrain originel. On pourra mélanger graines de radis et de carottes par exemple : les pousses, bien serrées, éviteront aux « mauvaises herbes » de trop pousser. Les radis, se développant plus vite que les carottes, pourront être enlevés rapidement pour être consommés, laissant alors plus de place aux carottes pour grandir.

 

Quelques conseils après la germination…

Lorsque la germination survient et que la plante commence à pointer son nez, il lui faut de la lumière. Si vos semis sont chez vous, mettez-les près d’une fenêtre, de préférence orientée plein sud, afin qu’ils puissent se développer. Lorsqu’il fait un grand soleil et très chaud, mieux vaut éviter d’arroser le pied plutôt que les feuilles pour ne pas que la plante brûle sous les rayons du soleil.

Si vous avez semé vos graines dans de tout petits godets, ou très serrées en lignes dans un bac, et s’il est encore trop tôt pour planter en pleine terre, vous pouvez déménager chacun de vos plants dans un godet plus grand, comme les plants de tomate en photo ci-dessous. Beaucoup de jardiniers préconisent d’attendre la fin des saints de glace de mai avant de repiquer au potager les plants qui craignent le gel. Dans le cas des légumes du soleil, vous pourrez enterrer la plante jusqu’à la première feuille au moment du repiquage.

 

 

Nourrir la terre pour nourrir la plante

Lorsque les plants se sont un peu déployés, comme la pousse  de tomate à droite sur la photo ci-dessus, vous pouvez commencer à fertiliser la terre pour lui apporter des nutriments, notamment avec du purin d’ortie ou de consoude, dont Nathalie nous donne la recette : « Vous prenez un kilo de plantes fraîches pour 10 litres d’eau, dans une grosse poubelle par exemple, avec un couvercle dessus. Remuez chaque jour. Le mélange va fermenter et mousser. Lorsque ça ne mousse plus, filtrez et gardez la mixture dans un bidon, que vous diluerez à 1/50ème avec de l’eau et appliquerez sur vos plants une fois par semaine, feuilles comprises. Quand votre plante sera plus grande (comme sur la photo de gauche) et mesurera plus d’une dizaine de centimètres, vous pourrez diluer cette fois à 1/20ème. » Précisons qu’il est aussi possible d’utiliser notre propre urine diluée à 1/10ème.

Des semences bio locales, ou pas !

Favoriser les semences locales, c’est ce que préconise Nathalie. L’avantage que vous en retirerez, c’est que vous aurez des espèces adaptées à votre territoire, à sa teneur en eau, son climat, la composition de son sol, etc.

Vous pourrez par exemple en trouver auprès de vos amis, voisins ou même en ligne, sous la forme de dons ou d’échanges. Vous pouvez aussi les récupérer vous-mêmes en laissant monter en graines certaines de vos plantations, ou en prenant et en faisant sécher celles logées à l’intérieur du fruit ou du légume, comme dans le cas des tomates, des poivrons ou des courgettes.

Si vous n’avez pas la possibilité ou l’envie de récolter vos propres graines ou de trouver des semences locales, vous pouvez aussi commander des graines auprès de certains semenciers bio comme Kokopelli, Biau Germe, Sainte Marthe, Sativa ou Germinance. « Mieux vaut ne pas commander de graines F1, car elles ne sont pas forcément reproductibles à la saison suivante à partir de vos plantes. On ne sait pas ce qu’elles donneront, contrairement aux semences bio non F1, accessibles officiellement aux jardiniers amateurs depuis 2020 », nous conseille Nathalie.

◆ Bémol sur les graines de cucurbitacées

En plus du fait de les planter pointes vers le bas, pas trop tôt pour qu’elles germent rapidement et pas trop en profondeur pour éviter les moisissures, et de ne pas trop les arroser les trois ou quatre jours après le semis, Nathalie nous conseille d’éviter les échanges de semences de courges. En effet, il arrive que des hybridations de courges comestibles et de courges d’ornement toxiques surviennent si elles sont disposées à moins d’un kilomètre les unes des autres. En consommant cette nouvelle espèce, nous pourrions le regretter et tomber malades. Une règle d’or : si vos courges ont un goût amer et si vous avez le moindre doute, même si elles ont mis du temps à pousser, ne les mangez pas. Les plants que Nathalie offre à la vente au printemps ne sont donc issus que de graines achetées chez des semenciers.

 

Les boutures, une autre façon de reproduire la plante

La bouture est une partie de la plante qui se coupe au sécateur ou avec les doigts avant d’être plantée en terre, dans un godet ou encore directement dans de l’eau. Placée sous des conditions appropriées de température, d’humidité et de nutriments, la bouture produira des racines et reproduira exactement la même variété que celle de la plante prélevée. Avant de nous montrer comment pratiquer avec les plantes aromatiques et médicinales de son jardin, Nathalie nous montre les boutures d’origan qu’elle a déjà réalisées.

Pour les aromatiques comme la menthe, le thym, le romarin, la sauge, la mélisse, Nathalie nous indique que de mars à juin on peut prélever le sommet de la plante, en coupant avec nos doigts juste en dessous de la jonction des premières feuilles, pour le planter ensuite dans le terreau. Dans les quinze jours qui suivent, à condition qu’elle soit arrosée comme il le faut et avec un accès à la lumière, la bouture devrait s’enraciner, puis grandir. Comme pour les semis, on pourra la faire passer par un pot plus grand quelques semaines plus tard, avant la mise en terre définitive. Pour le basilic, privilégier les semis plutôt que les boutures.

Des semences bio locales, ou pas !

Favoriser les semences locales adaptées au territoire, c’est ce que préconise Nathalie. Vous pourrez par exemple les trouver auprès de vos voisins, ou les récupérer vous mêmes en laissant monter en graines certaines de vos plantations. L’avantage que vous en retirerez, c’est que vous aurez des espèces adaptées à votre territoire, à sa teneur en eau, son climat, la composition de son sol, etc.

Si vous n’aviez pas la possibilité ou l’envie de récolter vos propres graines ou de trouver des semences locales, vous pouvez aussi commander des graines auprès de certains semenciers bio comme Kokopelli, Biogerme, Sainte Marthe, Sativa ou Germinance. « Mieux vaut ne pas commander de graines F1, car elles ne sont pas forcément reproductibles à la saison suivante à partir de vos plantes. On ne sait pas ce qu’elles donneront, contrairement aux semences bio non F1, accessibles officiellement aux jardiniers amateurs depuis 2020 », nous conseille Nathalie.

Les boutures, une autre façon de reproduire la plante

La bouture est une partie de la plante qui se coupe au sécateur ou avec les doigts avant d’être plantée en terre, dans un godet ou encore directement dans de l’eau. Placée sous des conditions appropriées de température, d’humidité, et de nutriments, la bouture produira des racines. Avant de nous montrer comment pratiquer avec les plantes aromatiques et médicinales de son jardin, elle nous montre les boutures d’origan qu’elle a déjà réalisées.

 

 

Pour les petits arbres type cassissier, les boutures se feront plutôt à l’automne, à partir de septembre, en coupant une branche au-dessus d’un œil ainsi que l’extrémité de cette branche, et en mettant l’œil en terre.

« Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage », écrivait La Fontaine. Cette citation nous semble particulièrement adaptée au jardinage. Entre le moment où vous sèmerez votre graine et celui où vous pourrez déguster votre production issue du jardin, il s’en passera des mois, ainsi que des imprévus, climatiques, logistiques ou personnels, qui pourront vous faire perdre une partie de vos plants. L’occasion peut-être de comprendre la valeur de ce que nous avons dans notre assiette. Peut-être celle aussi de respecter davantage notre nourriture, de proscrire le gaspillage et de favoriser les producteurs locaux.

👉 Pour découvrir le Jardin des Harmonies

 

Article par Estelle Brattesani

 

Image par congerdesign de Pixabay

 

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