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Palais de l’Élysée : un ancien hôtel particulier devenu lieu de pouvoir

Hôtel particulier construit il y a plus de trois siècles, le palais de l’Élysée a vu passer, malgré de multiples drames en ses murs, le gratin de la haute bourgeoisie et du pouvoir : comtes, marquises, princesses, empereurs et présidents de la République française. Garde-meuble royal, imprimerie nationale, résidence de princes étrangers ou encore de l’Empereur Napoléon, ce célèbre bâtiment du pouvoir français a connu la gloire, la mort et l’abandon.

 

Alors qu’Emmanuel Macron vient tout juste d’être reconduit au palais de l’Élysée pour un second quinquennat, revenons sur l’histoire de ce lieu de pouvoir encore peu connu des Français.

◆ Un palais construit grâce au sang de la traite négrière

Les hôtels particuliers ont commencé à voir le jour dans les faubourgs de Paris au début de XVIIIe siècle, encouragés par des nobles souhaitant échapper au caractère exigu de la ville de Paris, supplantée par l’apogée de Versailles. Henri de La Tour d’Auvergne, comte d’Évreux, avait commandé à l’architecte Armand-Claude Mollet une demeure de plaisance en plein milieu d’une zone maraîchère. Le palais est en partie financé par la dote de son épouse de 12 ans, fille d’Antoine Crozat, financier toulousain et homme le plus riche de son temps, ayant fait fortune dans la traite négrière. Démarrés en 1718, les travaux se sont achevés seulement quatre ans plus tard. Le comte congédia par ailleurs sa jeune épouse le jour même de l’inauguration

◆ Les larmes de la Pompadour

À la mort du comte d’Évreux en 1753, la duchesse Madame de Pompadour, la favorite de Louis XV, fit l’acquisition de la demeure. Elle souhaitait l’offrir à sa fille, qui décéda six mois après l’acquisition à seulement dix ans.
Trônant au centre d’un quartier populaire, des habitants mécontents s’attaquèrent parfois symboliquement au pouvoir, en dessinant des graffitis accusant les lieux d’être « la maison de la putain du roi ».
Malgré de multiples travaux somptueux, la marquise n’habitera pas réellement les lieux, préférant le faste et la tranquillité des couloirs de Versailles, reléguant in fine l’édifice au rang de modeste garde-meuble de la Couronne.

◆ Destitution de l’hôtel de Bourbon par la Révolution

La princesse Bathilde d’Orléans, cousine de Louis XVI, avait acheté l’hôtel d’Évreux en 1787. Il fut alors baptisé « l’hôtel de Bourbon » du fait du titre de sa propriétaire. Un nom d’édifice à consonance royale propre à attiser les élans destructeurs des sans-culottes, que la Révolution épargnera toutefois : sa dimension secondaire et son réemploi en tant qu’entrepôt, puis imprimerie en 1794, ou encore théâtre de bals populaires en 1797 justifièrent assurément l’absence de ressentiment antiroyaliste des révolutionnaires à l’encontre de l’édifice.

 

Palais de l’Élysée-Napoléon, 1810 © musée du château de Versailles / RMN-GP – G. Blot

 

Demeure impériale de Bonaparte…

Au début du XIXe siècle, le palais est passé des mains du prince Joachim Murat, beau-frère de Napoléon Ier, à l’empereur lui-même ! Bonaparte en prendra rapidement possession, promouvant la bâtisse en « Élysée-Napoléon » et accédant pour la première fois au statut de résidence d’État. C’est dans ce palais que l’Empire napoléonien meurt sous le coup de l’acte d’abdication de Napoléon Ier, signé le 22 juin 1815. Cette tradition mortifère a perduré après Napoléon avec l’assassinat du duc de Berry, troisième personnalité dans la hiérarchie du trône, en 1820 sur les marches de l’Opéra national, moins de quatre ans après avoir emménagé à l’Élysée.

◆ … puis maison d’ambassadeur…

Entre 1815 et 1848, le palais fut relégué au rang de demeure de diplomates, princes et autres aristocrates étrangers de passage à Paris. Il faudra attendre la IIe République de 1848 pour que l’Élysée connaisse ses premières heures républicaines, avec l’arrivée de Louis-Napoléon Bonaparte ; heures qui seront de courte durée avec son coup d’État de 1852, actant le passage de la IIe République au Second Empire. Bien qu’établi aux Tuileries, Louis-Napoléon Bonaparte, devenu Napoléon III, y a entrepris de grandes rénovations, qui dotèrent l’Élysée de sa forme définitive à l’occasion de l’Exposition universelle de 1867.

◆ … et enfin maison de la République

La République y rétablit ses quartiers, par l’intermédiaire d’Adolphe Thiers en 1874, sans discontinuer jusqu’à l’Occupation. Les deuils continuèrent sous les présidences des Républiques suivantes, puisque deux chefs d’État sont morts entre ses murs : Félix Faure à l’occasion d’une extase sexuelle, et plus tard Georges Pompidou, qui succombera de son cancer des poumons.

Bien que Vincent Auriol ait redonné au palais sa fonction présidentielle à l’occasion de la IVe République en 1946, l’aventure aurait pu tourner court pour l’Élysée, dès 1958, puisque le général de Gaulle, à l’aube de la Ve République, avait envisagé d’installer la présidence de la République au château de Vincennes plutôt qu’à l’Élysée ; demeure qu’il jugeait « trop bourgeoise, où l’esprit ne souffle pas » et remplie de « fantômes déplaisants. »

On se souviendra également de Valéry Giscard d’Estaing préférant siéger depuis son appartement parisien plutôt qu’à l’Élysée.

◆ L’Élysée au centre du maillage du pouvoir français

Construits sur des terres aujourd’hui emblématiques du pouvoir en France, les différents centres d’influence se sont amassés, au fil de l’Histoire, autour du bâtiment. On trouve notamment à proximité du palais de l’Élysée : l’Assemblée nationale, les Champs-Élysées, l’ambassade des États-Unis, la place de la Concorde, des sièges de grandes entreprises comme LVMH, l’Automobile Club de France (siège du Dîner du siècle) ou encore le siège de l’Institut Montaigne, think tank libéral et la Place Beauvau, siège du ministère de l’Intérieur.

Carte des lieux de pouvoir à Paris – Source : https://www.monde-diplomatique.fr/2019/02/A/59572

 

◆ Modernisations adaptées au XXIe siècle

Depuis la fin du XVIIe siècle, la notoriété du palais de l’Élysée a connu une ascension fulgurante, certes de par la position sociale de son commanditaire, mais surtout grâce à ses illustres occupants : tagué, converti, délaissé, abandonné et jalonné de nombreux drames, malgré une histoire mouvementée, le palais de l’Élysée a su rester un des centres du pouvoir français.

Il est aujourd’hui totalement adapté à une utilisation moderne, abritant à ce jour un réseau de près de 250 lignes téléphoniques, 500 postes informatiques connectés, une régie audiovisuelle, une salle de télésurveillance, son propre service médical, une station essence en sous-sol et un bunker abritant une douzaine de pièces secrètes, dont celle du commandement nucléaire de la salle Jupiter.

Le palais de l’Élysée compte à ce jour près d’un millier de salariés, dédiés au plein fonctionnement de l’institution, et un budget astronomique défrayant régulièrement la chronique.

 

Sources :

https://www.histoire-pour-tous.fr/histoire-de-france/4132-histoire-du-palais-de-lelysee-residence-presidentielle.html

https://www.geo.fr/histoire/le-palais-de-l-elysee-167779

https://www.herodote.net/L_Elysee_un_cauchemar_pour_les_residents-synthese-1730.php

 

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