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Bientôt les Jeux asiatiques d’hiver au milieu du désert, dans une ville sous haute-surveillance qui n’existe pas encore

À l’heure où l’on dénonce partout le désastre écologique et où les pays s’engagent à agir pour tenter d’y remédier, l’Arabie saoudite accueillera en 2029 les Jeux olympiques asiatiques d’hiver à Neom, une ville qui n’a pas encore vu le jour. L’occasion de transformer en mégalopole technologique et en « terrain de jeux » une zone actuellement aride.

 

Bâtir d’ici 2045 deux immeubles face à face recouverts de miroirs d’une hauteur de 500m sur une distance de 170km et sur une largeur de 200 mètres dans une ville baptisée Neom, avec son port industriel et sa station d’hiver, c’est le projet du prince et Premier ministre Mohammed ben Salmane en Arabie saoudite. Le tout sous haute-surveillance.

◆ Une termitière humaine et technologique

Présenté en 2017, le projet appelé « The Line » dont les participants se disent « pionniers du changement » ou accélérateurs du progrès humain ambitionne de superposer maisons, écoles et parcs au sein de la nouvelle ville de Neom. « The Line » sera bâti avec Trojena, une station hivernale avec ses pistes de ski en plein air, son lac artificiel et ses chalets de luxe pour ne citer qu’eux, et Oxagon, un port gigantesque donnant sur la mer Rouge.

Une zone bâtie sur une superficie de 26.500 km2, grande comme trois fois l’île de Chypre.

Les 9 millions d’habitants qui sont attendus d’ici 2045 sont supposés pouvoir répondre à « tous leurs besoins quotidiens » en cinq minutes à pied, ainsi que bénéficier d’un train à grande vitesse traversant la ville en 20 minutes, ou de véhicules volants. Le prince ambitionne également d’en faire une ville sans voitures (mais avec aéroport), la plus vivable « sur toute la planète », avec des robots de l’intelligence artificielle.


◆ Une ville sous haute surveillance


Pas un mot ou presque dans les articles actuels qui circulent au sujet de Neom et des Jeux asiatiques d’hiver sur les révélations du Wall Street Journal. Challenges rapportait en 2019 que le journal américain a pu consulter 2.300 pages de documents confidentiels issus des travaux des sociétés Boston Consulting Group, McKinsey & Co. et Oliver Wyman, associées au projet.

Ces documents ont révélé le côté très inquiétant du projet Neom, « digne du film “Minority Report ».

Le conseil d’administration de Neom présidé par Mohamed ben Salmane lui-même en plus de ses fonctions étatiques, y a affirmé que « cela devra être une ville automatisée où nous pouvons tout surveiller ».  Une ville « où un ordinateur peut signaler les crimes et où tous les citoyens peuvent être suivis ».

 

 

◆ Des coûts colossaux

Cet aspect du projet n’a pas empêché le conseil olympique d’Asie (OCA) d’annoncer mardi 4 octobre que l’Arabie saoudite a été désignée à l’unanimité pour accueillir les Jeux asiatiques d’hiver de 2020 pendant son assemblée générale à Phnom Penh au Cambodge et que « les déserts et les montagnes d’Arabie saoudite seront bientôt un terrain de jeu pour les sports d’hiver ».

Terrain de jeu qui coûtera d’ici 2030 pour sa première phase 319 milliards de dollars selon Mohammed ben Salmane.

Le Daily Mail évalue quant à lui le projet à plus d’un billion de dollars (1.000 milliards).

◆ De la science-fiction en plusieurs volets ?

En pleine polémique sur la Coupe du monde de football qui se tiendra au Qatar, dans un entretien à l’AFP, le prince Abdulaziz ben Turki Al-Faisal, le ministre saoudien des Sports, a déclaré souhaiter que son pays organise un jour des Jeux olympiques. Un responsable égyptien a déclaré en septembre dernier que l’Égypte, la Grèce et l’Arabie saoudite avaient commencé à discuter d’une éventuelle candidature conjointe pour la Coupe du monde de football en 2030… Y aura-t-il alors un Neom 2 et un Neom 3 ?


◆ Un rêve « écologique » pour certains, un cauchemar pour d’autres

Le projet Neom doit incarner la transition écologique arabe  avec « Vision 2030 ». Mais si « The Line » se dépeint comme hyper-écologique, les ressources nécessaires à sa construction ou à son fonctionnement ne se trouvent pas sur place.

La station hivernale Trojena va devoir quant à elle fonctionner avec de la neige artificielle dans un pays où il ne neige pas.

Comme l’indique l’Est Républicain, « Nombre de scientifiques et architectes mettent aussi en doute la faisabilité même du projet : outre l’internet à haut débit sans fil pour tous, Neom doit être dotée de valets robotisés, de taxis volants, de plages phosphorescentes et même… d’une lune artificielle. L’ensemble doit être construit en moins de dix ans, ce qui semble irréalisable. » Des personnalités politiques comme le député François Ruffin s’indignent.

 

Outre les milliers de personnes qui vont devoir quitter leurs logements pour la réalisation de Neom, on peut se demander quel sort sera réservé aux opposants à ce projet et aux résidents qui ne respecteront pas les règles de Neom dans un pays où la peine de mort est autorisée, les libertés fondamentales sont bafouées et où l’on démembre les journalistes gênants…

Nous n’avons pas encore enquêté sur tous les partenaires du projet, mais nous serions très étonnés de n’y trouver que de fervents et congruents défenseurs de l’environnement et des droits humains…

 

Article par Estelle Brattesani

 

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