Témoignage

Masque en école primaire : témoignage d’un professeur des écoles d’une classe de CE1

Nous avons passé il y a quelques jours un appel à témoignages au personnel soignant et éducatif afin de partager avec vous leur expérience au sujet du port du masque obligatoire pour les enfants. Voici pour commencer celui d’un professeur des écoles de CE1.

NOTRE APPEL TOUJOURS D’ACTUALITÉ :

APPEL À MÉDECINS / PÉDIATRES / INFIRMIÈRES SCOLAIRES / PROFESSEURS OU TOUT AUTRE PERSONNEL SOIGNANT OU ÉDUCATIF EN LIEN AVEC DES ENFANTS DE 6 À 11 ANS POUR TÉMOIGNAGES DE VOTRE EXPÉRIENCE AU SUJET DES MASQUES. AVEZ-VOUS PU CONSTATER DES EFFETS NÉGATIFS SUR CES ENFANTS ET SI OUI, LESQUELS ? OU AU CONTRAIRE QUE TOUS LES ENFANTS LE TOLÉRAIENT BIEN SANS AUCUN PROBLÈME PHYSIQUE OU PSYCHIQUE ? QUEL SORT EST-IL RÉSERVÉ AUX ENFANTS QUI LE SUPPORTENT MAL ?

La question des masques chez les enfants est une question qui me préoccupe énormément depuis son instauration dans les écoles. Étant professeur des écoles depuis 13 ans, j’ai depuis plusieurs années des CE1 en REP (Réseau d’Éducation Prioritaire). L’obligation du port du masque à partir du retour des vacances de la Toussaint a été pour ma part un véritable choc. Toucher aux enfants alors que depuis le début de l’épidémie on nous disait qu’ils n’étaient pas contaminants était pour moi d’une incohérence totale et la limite à ne pas dépasser.

J’ai expliqué à mes élèves les règles du port du masque mais par la suite, je me suis toujours refusée de faire la moindre remarque sur la façon dont ils le portaient, car ce serait en total désaccord avec ma vision des choses.

Cependant, il ne faut que quelques secondes pour qu’ils se dénoncent entre eux.

Après plusieurs jours, j’ai eu le sentiment que je m’étais peut-être trop vite inquiétée, car mes élèves portaient le masque sans se plaindre. Malgré tout, il était important pour moi de dédramatiser la situation déjà extrêmement anxiogène pour eux. Alors dès les premiers jours, je leur ai proposé d’avoir dans leur cartable une bouteille d’eau afin de boire et d’avoir la possibilité de retirer le masque pour respirer quand ils le souhaitaient en classe en toute « légalité ». Certains l’ont fait et le font toujours. Je leur ai aussi proposé de mettre leur masque sous le nez lors des séances de sport en extérieur. Mais seulement deux ou trois d’entre eux le font. J’ai un élève qui a saigné du nez tous les jours pendant les 2 premières semaines de novembre environ.

Trois de mes élèves qui portaient des lunettes quotidiennement ne le font plus. Ça les gène, il y a de la buée… Quels seront les effets sur leurs yeux sur le long terme ? Ce qui m’a aussi alertée, c’est que deux de mes élèves n’avaient qu’un seul masque pour la semaine. Je vous laisse imaginer l’état du masque le vendredi après-midi, surtout que l’un d’entre eux mange à la cantine et le garde aussi tout le long de la récréation… Où est l’avantage pour cet enfant, entre mettre le même masque toute la semaine et respirer librement ?

Avant les fêtes de Noël, je les ai pris en photos pour faire des calendriers et pour cela, je leur ai demandé de retirer leur masque quelques secondes, juste le temps de prendre la photo. Certains restaient en apnée, de peur de contaminer la classe.

En fait, la crainte de contaminer les autres est extrêmement importante chez les enfants.

Ce qui a été le plus difficile pour moi, c’est quand l’un de mes élèves m’a dit « de toute façon, je sais que je vais mourir du covid ». Cela m’a extrêmement choquée, et je n’ai pas pu m’empêcher de m’arrêter sur son propos et d’en débattre avec les enfants afin de trouver des mots pour le rassurer. C’est ce même élève qui, à un goûter d’anniversaire en classe, remettait son masque après chacune de ses bouchées de part de gâteau. Le conditionnement chez certains d’entre eux m’effraie, je pense qu’il y aura des séquelles au niveau psychologique, c’est même une évidence.

Depuis le mois de Janvier, je commence tout de même à ressentir un léger retournement de situation et une certaine lassitude chez mes élèves avec le masque. Je ressens aussi beaucoup de fatigue et un manque de concentration. Ce que je ne remarquais pas avant, en tout cas pas à ce point.
Moi-même je ne me suis rarement sentie aussi fatiguée le mois dernier. J’ai pensé à acheter un oxymètre pour moi, mais aussi pour tester les élèves avant et après la classe. Mais je ne l’ai pas encore fait car je ne voudrais pas jouer aux infirmières et je ne suis pas sûre que je serais soutenue par les parents d’élèves.

Il y a aussi le risque d’être dénoncée à mon inspection.

Il faut savoir que dans mon école de 80 élèves, aucune famille ne s’est manifestée contre le port du masque à l’école à ma connaissance. Je me sens extrêmement seule à m’inquiéter sur ce sujet. Je suis d’ailleurs consciente d’être un ovni dans l’éducation nationale. Une grande majorité d’enseignants défend cette obligation. Peut-être ai-je tort de m’inquiéter ? Je n’en sais rien finalement.

C’est une situation très compliquée pour moi, car je suis à la fois obligée de respecter les règles en tant que fonctionnaire, mais aussi parce que certaines familles ont vraiment peur.

Dans ma classe, j’ai instauré en même temps que cette mesure du port du masque une fusée des émotions. Chaque matin, les enfants positionnent leur étiquette-prénom sur l’émotion qu’ils ressentent en arrivant le matin (Joyeux, inquiet, furieux, triste etc). Ça me semblait vraiment important d’instaurer cela pour pouvoir détecter des comportements particuliers vis à vis de la situation.

Un jour de février, j’ai eu cette situation que j’avais pris le temps de noter et je me permets de la partager avec vous :

H se place à « énervé » sur la fusée des émotions.

Moi : Que t’arrive-t-il ?

H : J’en ai marre des masques, j’en peux plus.

Moi : Je te comprends, mais malheureusement on n’a pas vraiment le choix…

H : En plus j’en ai marre de Macron, c’est un menteur, il ment tout le temps. Comme Trump.

Moi (rire) : Tu sais, si ça ne tenait qu’à moi vous ne porteriez plus le masque en classe mais malheureusement, je ne peux pas faire ce que je veux. Et puis dans vos familles, certains ont des personnes vulnérables ou ont peur, et je le respecte aussi.

M : Moi ce que je comprends pas, c’est que les écoles elles sont ouvertes et les restos ils sont fermés, ça n’a pas de sens.

L : En plus y a des traitements.

E : Au Kosovo (dans sa famille), les restaurants ils sont ouverts et on doit pas rentrer chez soi à 18h.

M : Moi, je le jour où on n’en portera plus, je les arrache tous et direct poubelle ! »

Je remercie mes élèves de savoir faire preuve d’esprit critique, ils me redonnent de l’espoir dans cet avenir si sombre ! Vivement qu’ils soient tous libérés de ces masques qui m’empêchent de voir leurs sourires.

Un professeur anonyme, le 17 mars 2021

 

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