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Plus d’un million de voix contre la loi Duplomb : une pétition historique secoue le débat public

La loi Duplomb, portée par les sénateurs Laurent Duplomb et Franck Menonville, vise à simplifier les contraintes réglementaires pesant sur les agriculteurs afin de favoriser la compétitivité et la survie des exploitations. Adoptée début juillet 2025, cette loi suscite une forte mobilisation citoyenne, avec une pétition ayant déjà réuni plus d’un million de signatures, dénonçant ses conséquences environnementales. Ce texte illustre aussi une contradiction croissante au sommet de l’État : les discours officiels sur « l’urgence climatique » ne résistent pas aux arbitrages politiques.

◆ Un soutien assumé à une agriculture productiviste

Ses partisans la défendent comme une réponse concrète à la détresse du monde agricole. En simplifiant les règles, en facilitant la construction de bassines ou en assouplissant l’usage de certains pesticides, la loi serait un levier de souveraineté alimentaire, de compétitivité et de survie pour les exploitants.

Mais derrière cette volonté d’allègement, beaucoup, comme l’association Générations futures, la voient comme un « cadeau à l’agrobusiness », au détriment de l’environnement, de la santé publique et des modèles agricoles durables.

◆ Un recul écologique assumé… sous prétexte d’efficacité

La loi permet notamment la réintroduction d’un pesticide néonicotinoïde (acétamipride), reconnu toxique pour les pollinisateurs. Elle facilite aussi l’implantation d’élevages industriels et de mégabassines, en contournant les études d’impact ou les consultations publiques.

Elle s’en prend également à un acteur clé du contrôle environnemental : l’Office français de la biodiversité (OFB). Cet établissement public est chargé de surveiller, protéger et faire respecter la loi en matière de biodiversité, d’eau et de milieux naturels. Ses agents peuvent par exemple contrôler l’usage des pesticides, sanctionner les pollutions agricoles ou intervenir sur des projets d’aménagements sensibles.

Avec la loi Duplomb, ses directeurs régionaux seront désormais nommés par les préfets, donc placés sous l’autorité politique locale, et non plus sous une logique d’indépendance. Cela fait craindre une mise au pas de l’OFB, affaiblissant sa capacité à intervenir face à des pratiques illégales ou destructrices de l’environnement. Pour de nombreuses ONG, c’est un signal clair : l’État veut neutraliser l’un des derniers contre-pouvoirs environnementaux sur le terrain.

◆ Une contestation massive et inédite

Le 10 juillet 2025, Éléonore Pattery, étudiante en master QSE/RSE, a lancé sur le site de l’Assemblée nationale une pétition intitulée « Non à la Loi Duplomb — Pour la santé, la sécurité, l’intelligence collective ». En moins de deux semaines, elle a recueilli plus d’un million de signatures, devenant la pétition la plus signée de toute l’histoire de la plateforme officielle de l’Assemblée nationale.

Dans son texte, Éléonore Pattery dénonce une loi qu’elle qualifie d’« aberration scientifique, éthique, environnementale et sanitaire », soulignant qu’elle constitue une attaque contre la santé publique, la biodiversité, la cohérence des politiques climatiques et la sécurité alimentaire. Elle appelle à l’abrogation de la loi et à une révision démocratique de son adoption.

Parallèlement, plus de 60 députés de gauche (Insoumis, écologistes, communistes) ont saisi le Conseil constitutionnel le 11 juillet, dénonçant un recours à une procédure accélérée ayant privé le Parlement d’un débat suffisant sur le texte.

Vous pouvez consulter et signer la pétition ici :

◆ Une polémique politique et sociale

La loi Duplomb divise aussi sur le plan politique. Sandrine Rousseau a suscité une vive polémique après avoir déclaré, lors d’une émission le 11 juillet : « Je n’en ai rien à péter de leur rentabilité », dénonçant un modèle agricole productiviste qu’elle juge destructeur pour la santé, les sols et la biodiversité. Face aux critiques, elle a précisé qu’elle soutenait les agriculteurs, mais refusait que leur survie repose sur ce qu’elle appelle de « l’argent sale ».

◆ Hypocrisie climatique ?

Cette loi interroge : comment prétendre porter une politique ambitieuse de transition écologique tout en affaiblissant les outils censés la garantir ? Depuis 2022, Emmanuel Macron n’a eu de cesse de mettre en avant la  planification écologique  comme un pilier de son second quinquennat, affirmant vouloir faire de la France une grande nation écologique et inscrire l’écologie au cœur du modèle français.

De son côté, la Première ministre Élisabeth Borne avait également souligné que la planification écologique devait devenir un pilier central de la souveraineté nationale.

Mais dans les faits, avec cette loi, les arbitrages penchent clairement en faveur d’un modèle productiviste, au détriment de la protection du vivant et de la santé publique. L’OFB est fragilisé, les contrôles environnementaux desserrés, les pesticides réintroduits par décision politique. Autant de signaux qui contredisent l’ambition affichée par le gouvernement depuis trois ans.

◆ Une question toujours ouverte

Si la loi Duplomb a été adoptée, le débat public est loin d’être clos, entre urgence agricole et impératif écologique. La question désormais : comment concilier les deux sans sacrifier ni la terre, ni ceux qui la cultivent ?

Journaliste : Estelle Brattesani

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