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« Autotests : questions-réponses avec la Direction de la santé »

Fin septembre, au moment du bouclage de notre enquête « Autotests : incohérences et manque de fiabilité en série » parue dans le numéro 137 de Nexus (novembre-décembre 2021), la Direction générale de la santé répondait enfin à nos sollicitations. Pour des raisons pratiques d’édition, nous avons choisi de diffuser cette réponse en ligne sur la présente page.


Nexus
 : Madame, Monsieur,

La qualité des autotests vendus en pharmacie pose question. Entre manque d’efficacité, notices d’utilisation inadéquates et provenances douteuses, pouvez-nous nous rappeler le protocole de la mise en place des autotests vendus en pharmacie qui utilisent le prélèvement nasal ?

Direction générale de la santé (DGS) : L’avis rendu par la HAS le 15 mars dernier a permis le déploiement des autotests supervisés qui viennent en complément, et non en substitution, de l’arsenal des outils de dépistage mis à disposition. Cette solution a d’abord connu les hésitations de la communauté scientifique en raison du manque de données scientifiques sur les performances des autotests pour le diagnostic de la Covid-19 en vie réelle, et de sa difficulté d’utilisation. Si la réalisation du prélèvement est simple (le patient le réalise seul, à domicile, en se piquant le bout du doigt), il n’en est pas de même pour la lecture et l’interprétation du résultat. Sans accompagnement, le patient prend le risque de tirer des conclusions erronées de ce test.

Sa mise en place a donc fait l’objet d’une stratégie de déploiement prudente. En effet, elle permet de toucher des publics qui ne sont pas assez testés et potentiellement contaminants, même s’ils ne présentent pas de symptômes.

Ainsi, les personnes symptomatiques et les cas contacts doivent continuer à se faire tester par RT-PCR ou tests antigéniques sur prélèvement nasopharyngé. Par ailleurs, et comme les autres tests disponibles, ils ne permettent pas, même en cas de résultat négatif, de lever le maintien des gestes barrières.

 

Nexus : Nous voyons apparaître dans nombre d’officines des autotests dans le cadre du dépistage de la Covid-19. De marques différentes, ils sont vendus à l’unité ou par lot de cinq, et proviennent pour la plupart de Chine.

DGS : La mise sur le marché et l’utilisation des autotests Covid-19 sont encadrées par la réglementation. Ainsi, ces autotests doivent répondre aux deux conditions cumulatives posées par l’arrêté du 1er juin 2021, c’est-à-dire :

– disposer d’un marquage CE ou d’une dérogation de l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) ;

– satisfaire aux critères édictés par la Haute Autorité de santé (sensibilité supérieure ou égale à 80 % et spécificité supérieure ou égale à 99 % établies après évaluation selon le protocole figurant sur les sites de l’ANSM et du MSS ; voir protocole ci-dessous).

À titre exceptionnel et dans l’intérêt de la protection de la santé, sans préjudice des procédures prévues aux articles L. 5221-2 et L. 5221-3 du Code de la santé publique, les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro de détection antigénique du virus par autotests qui n’ont pas achevé leur évaluation de conformité permettant le marquage CE peuvent soumettre une demande à l’ANSM en vue d’une mise sur le marché à titre dérogatoire dans les conditions prévues à l’article 9(12) de la directive 98/79/CE susvisée, dès lors qu’ils satisfont aux critères édictés par la Haute Autorité de santé. L’ANSM est susceptible, après une évaluation multicritère de l’intérêt de la protection de la santé, critères parmi lesquels figurent notamment les éléments transmis et la couverture capacitaire, de délivrer une dérogation. Cette dérogation devant couvrir le temps nécessaire à l’obtention d’un certificat de conformité délivré par organisme notifié et permettant l’apposition du marquage CE, la demande ne sera prise en compte qu’avec la transmission d’un contrat signé avec un organisme notifié, et la mention du délai prévisionnel d’obtention de ce certificat.

La liste des autotests autorisés sur le marché français est disponible à cette adresse.

À date, 43 autotests sont autorisés en France, parmi lesquels 18 disposent d’un marquage CE.

Plusieurs fabricants sont français, certains sont de l’UE et d’autres de Chine ou de Corée.

Les fabricants français AAZ et Biosynex ont été les premiers fabricants à recevoir une dérogation de l’ANSM.


Nexus
 : Selon les dires des pharmaciens que nous avons interrogés, la cible de l’autotest est la suivante :

– tout individu sans symptôme qui projette une soirée entre amis à domicile et qui cherche à se rassurer, ainsi que le groupe, et éviter une transmission du virus.

Nous avons acheté certains de ces tests et étudié leur notice d’utilisation.

Nous constatons que pour chacun d’entre eux, les indications sur le positionnement de la tête et le prélèvement lui-même sont pour le moins légères et manquent de précisions.

DGS : Les indications des autotests Covid-19 sont définies dans l’avis de la HAS.

Les autotests antigéniques sur prélèvement nasal préalablement validés peuvent être utilisés dans les indications suivantes :

Indication « sociétale » :

– chez les personnes asymptomatiques de plus de 15 ans dans le cadre d’une utilisation ponctuelle restreinte à la sphère privée (par exemple, avant une rencontre avec des proches…). Le test antigénique rapide sur prélèvement nasal devra idéalement être réalisé le jour même ou à défaut la veille de la rencontre.

Indication médicale en complément des modalités de dépistage existantes :

– chez les personnes asymptomatiques de plus de 15 ans, dans le cadre d’un dépistage itératif (donc régulier) ciblé à large échelle en alternative aux TDR/TROD* antigéniques sur prélèvement nasopharyngé ou nasal. En répétant le test une à deux fois par semaine, sur une large population, on augmente les chances de réaliser le test au début de la maladie, c’est-à-dire au moment où le virus est le plus présent et le plus facilement détectable, et surtout au moment où on est le plus contagieux.

Le choix entre TDR/TROD et autotest dépend du mode d’organisation du dépistage et de la volonté et de l’aptitude à réaliser elles-mêmes le test des personnes à dépister.

Pour rappel, tout autotest antigénique positif doit ensuite faire l’objet d’une confirmation par test RT-PCR, permettant également de caractériser le variant en présence.

Vous pouvez retrouver depuis le site du ministère de la Santé une vidéo pédagogique sur les bonnes pratiques liées aux autotests.

Les performances des tests, leurs notices, les revendications, les cibles, les démarches de certification, l’organisme notifié, le rapport de praticabilité, c’est-à-dire la possibilité pour une utilisation par une personne, sont des éléments qui sont systématiquement vérifiés et suivis par l’ANSM, et qui doivent répondre à la réglementation inhérente en vigueur.

 

Nexus : Par ailleurs, pour l’un des autotests (GP Getein), la notice précise :

« Le test est seulement destiné aux utilisations professionnelles ou expérimentales, pas pour les tests à domicile. »

Comment peut-il être disponible à la clientèle dans les pharmacies ?

Enfin, l’Académie nationale de médecine appelait en février 2021 à « ne pas recourir aux autotests en raison de leur fiabilité médiocre ».

L’utilisation de tests à domicile ne représente-t-elle pas un risque de résultats erronés, causés par une mauvaise manipulation, et donc de contagion entre les individus ?

De plus, un prélèvement nasal fait à domicile peut-il constituer un risque de lésions de la cloison nasale ?

DGS : Les autotests sont un type de tests antigéniques. La Haute Autorité de santé impose, pour autoriser ces tests, qu’ils soient en mesure de détecter la présence du virus chez une personne effectivement malade dans 80 % des cas a minima, et qu’ils soient en mesure de constater l’absence de virus chez une personne effectivement non malade dans plus de 99 % des cas. Ainsi, le risque de faux positifs, c’est-à-dire le risque d’être testé positif alors qu’on n’est en réalité pas porteur du virus, est extrêmement faible : il survient dans moins de 1 % des cas.

Le prélèvement des autotests n’étant pas réalisé par un professionnel de santé, mais par l’usager lui-même, la possibilité d’obtenir un « faux négatif » (résultat négatif alors que la personne est malade) causée par une erreur de prélèvement est bien réelle. Le fait de réaliser ce test sous la supervision d’un professionnel de santé permet de limiter ces erreurs.

De plus, le caractère itératif, c’est-à-dire répété plusieurs fois, par exemple une à deux fois par semaine, de l’utilisation des autotests permet d’augmenter leur fiabilité par la répétition régulière des prélèvements.

Enfin, il est primordial de garder à l’esprit qu’un résultat négatif ne signifie pas nécessairement que l’utilisateur n’est pas porteur du virus. C’est d’ailleurs le cas de tous les tests disponibles : aucun test ne doit conduire, en cas de résultat négatif, à lever les gestes barrières.

Tout résultat positif à un autotest doit faire l’objet d’une confirmation par un test RT-PCR, un certificat assure l’accès prioritaire au laboratoire de biologie médicale.

 

Nexus : Nous sommes conscients que les questions sont nombreuses, et vous remercions par avance de votre prompt retour,

Très cordialement,

Diane OMONT

Magazine Nexus

 

* TDR : tests de diagnostic rapides ; TROD : tests rapides d’orientation diagnostique.

Lire notre article dans notre numéro 137 actuellement en kiosque et en vente en ligne :

 

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